Salle de presse
À l’échelle internationale, la pandémie et les mesures prises pour la combattre ont engendré, en 2020, une chute de 3,5 % de l’activité économique, mesurée par le produit intérieur brut (PIB), suivie en 2021 d’un fort rebond de 6,3 % constituant un rattrapage en partie. L’année 2022 marque le début d’un ralentissement de la croissance économique. De plus, en raison notamment des hausses des taux directeurs des banques centrales dans le but de contenir l’inflation, les récentes prévisions à l’égard de la croissance économique mondiale et canadienne pour 2022 s’avèrent nettement plus modestes par rapport aux précédentes.
Aux États-Unis et à l’échelle mondiale au niveau mondial, le tableau ci-dessous indique que l’accroissement du PIB devrait atteindre respectivement 1,6 % et 2,7 % en 2022. En plus de la hausse des taux directeurs, cette croissance modeste de notre principal partenaire commercial et de l’ensemble du monde s’explique, entre autres choses, par les tensions géopolitiques, la guerre en Ukraine et les contraintes relatives à la politique de zéro covid en Chine. Le Québec et le Canada se distinguent en 2022 par un ralentissement moins prononcé de la croissance du PIB qui devrait atteindre respectivement 3,8 % et 3,2 %.
Si la situation relative à la pandémie de la covid-19 a engendré une chute du PIB en 2020, la nécessité de faire diminuer l’inflation par l’affaiblissement de la demande à la suite de la hausse des taux d’intérêt devrait mener à une croissance anémique du PIB en 2023, et ce, pour la plupart des économies avancées, dont le Québec, le Canada et les États-Unis. À ce chapitre, les résultats économiques de l’ensemble du secteur agricole québécois font généralement preuve d’une grande résilience lors de conjonctures macroéconomiques défavorables en raison notamment du besoin constant de s’approvisionner en aliments et biens de première nécessité.
Pays / Régions du monde | 2020 | 2021 | 2022 (prévision) | 2023 (prévision) |
---|---|---|---|---|
Québec | -5,3 | 5,6 | 3,8 | 0,1 |
Canada | -5,3 | 4,5 | 3,2 | 0,0 |
États-Unis | -3,4 | 5,7 | 1,6 | 0,1 |
Ensemble des économies avancées* | -4,8 | 5,1 | 2,4 | 1,3 |
Chine | 2,3 | 8,1 | 2,8 | 4,6 |
Ensemble des économies émergentes et en développement** | -2,6 | 7,0 | 2,9 | 3,3 |
Monde | -3,5 | 6,3 | 2,7 | 2,2 |
L’Agro-indicateur est un modèle économétrique qui permet d’estimer les revenus, les dépenses et le revenu agricole net de l’année en cours à partir de variables représentatives de l’économie agricole du Québec. Les recettes monétaires agricoles ainsi que les prix des produits agricoles et des intrants constituent les principales données utilisées. La définition du revenu agricole net considéré pour l’Agro-indicateur correspond aux recettes monétaires agricoles totales provenant des produits agricoles et des paiements directs aux producteurs desquelles les dépenses d’exploitation et les frais d’amortissement sont soustraits.
La conjoncture de prix élevés des produits agricoles, dont notamment ceux exposés au contexte nord-américain, a particulièrement contribué à la forte hausse de 18 % ou 940 millions de dollars des recettes monétaires agricoles (RMA) québécoises au cours du premier semestre de 2022 en comparaison à la même période l’an dernier.
Selon l’Agro-indicateur, les RMA pourraient atteindre plus de 12,8 milliards de dollars en 2022 et, ainsi, enregistrer leur plus forte croissance grâce à une conjoncture de prix généralement élevés. La prévision des dépenses totales atteint 11,7 milliards de dollars, soit 17 % de plus que l’an dernier. Cette hausse est également la plus prononcée à ce jour dans un contexte caractérisé par la guerre en Ukraine, qui a exacerbé les augmentations de coûts des intrants, dont notamment le carburant, les engrais et l’alimentation animale. La hausse des coûts d’emprunts à la suite des hausses du taux directeur de la Banque du Canada (BC) fait également partie des éléments qui contribuent à cette forte hausse des dépenses en 2022. Ainsi, le revenu agricole net en 2022 pourrait se situer aux alentours de 1,1 milliard de dollars, ce qui correspondrait à une légère diminution de l’ordre de 0,1 milliard de dollars par rapport à 2021. Bien que ces résultats globaux soient plutôt neutres, certaines entreprises peuvent éprouver des difficultés particulières en lien avec le contexte de 2022, par exemple à la suite de la hausse des coûts des intrants et des taux d’intérêt.
* Sans tenir compte de la valeur de la variation des stocks.
De 2009 à 2021, les recettes monétaires agricoles québécoises ont progressé de 7 443 à 11 218 millions de dollars. Au cours de la même période, les dépenses sont passées de 6 586 à 10 001 millions de dollars, ce qui a permis de dégager un revenu net de respectivement 857 et 1 217 millions de dollars en 2009 et 2021. Pour 2022, l’Agro-indicateur prévoit des recettes monétaires agricoles, des dépenses et un revenu agricole net de respectivement 12 866, 11 731 et 1 135 millions de dollars.
Catégories de revenus | 2014 | 2015 | 2016 | 2017 | 2018 | 2019 | 2020 | 2021 | Moyenne 2014-2021 |
---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|
Recettes monétaires – Cultures | 2 679 | 2 726 | 3 228 | 3 130 | 3 217 | 3 596 | 3 994 | 4 200 | 3 346 |
Recettes monétaires – Bétail | 5 506 | 5 279 | 5 155 | 5 338 | 5 214 | 5 539 | 5 636 | 6 444 | 5 514 |
Recettes monétaires du marché | 8 185 | 8 005 | 8 382 | 8 468 | 8 430 | 9 135 | 9 630 | 10 645 | 8 860 |
Paiements de programmes | 321 | 201 | 393 | 314 | 462 | 535 | 644 | 574 | 430 |
Recettes monétaires agricoles totales | 8 506 | 8 206 | 8 776 | 8 782 | 8 892 | 9 670 | 10 274 | 11 218 | 9 291 |
Dépenses d'exploitation nettes et d'amortissement | 7 447 | 7 544 | 7 674 | 7 781 | 8 323 | 8 783 | 9 183 | 10 001 | 8 342 |
Revenu net* | 1 058 | 662 | 1 101 | 1 001 | 569 | 887 | 1 091 | 1 217 | 948 |
Du côté des productions végétales au cours du premier semestre 2022, la hausse de la valeur des recettes monétaires fut fulgurante avec 33 % ou 576 millions de dollars, comparativement au premier semestre de l’année précédente. Celle-ci s’explique notamment par la récolte record de sirop d’érable de 211 millions de livres qui a généré 232 millions de dollars de plus que l’an dernier. De plus, elle s’explique par la hausse prononcée des revenus provenant des céréales et des oléagineux, plus précisément le maïs et le soya avec des augmentations respectives de 116 et 83 millions de dollars.
À l’échelle nord-américaine et mondiale, les prix des céréales et des oléagineux ont progressé au cours du premier semestre 2022. Cette progression a été causée par une demande soutenue dans un contexte d’offre limitée exacerbé par la guerre entre la Russie et l’Ukraine qui a limité la capacité d’approvisionner les marchés. Les prévisions du ministère américain de l’Agriculture (USDA) sont à l’effet d’un maintien du faible niveau des ratios stocks-utilisations en 2022-2023 tant pour le maïs que le soya.
Version texte du graphique Ratio du stock de clôture sur la consommation totale de maïs et de soya
De 2017-2018 à 2022-2023, les ratios du stock de clôture divisé par la consommation totale connaissent une tendance à la baisse, et ce, tant pour le soya que le maïs et tant du côté des États-Unis qu'au niveau mondial.
Au cours du premier semestre 2022, les recettes monétaires des productions animales ont connu une croissance de 8 % en comparaison à la même période l’an passé, ce qui leur a permis d’atteindre un record de 3,43 milliards de dollars. Ce résultat s’explique notamment par la hausse de 10,4 % des revenus provenant des produits assujettis à la gestion de l'offre, soit le lait, la volaille et les œufs. Dans la foulée de la hausse des coûts de production, les prix consentis aux productions sous gestion de l'offre se sont ajustés à la hausse. En ce qui a trait à la production porcine, malgré une légère diminution des prix, les recettes monétaires ont tout de même progressé de 3,6 %. Les prix du secteur bovin renouent avec la croissance en 2022 et ceci permet une augmentation des revenus de 10,2 % pour cette production qui a connu une période prolongée de prix moins élevés.
L'Indice des prix des produits agricoles (IPPA) mesure la variation des prix que reçoivent les agriculteurs pour les produits agricoles qu'ils produisent et qu'ils vendent. La période pendant laquelle l'IPPA équivaut à 100 est l'année 2007. L'indice compare, en pourcentage, les prix agricoles courants aux prix pendant l'année de référence 2007 égale à 100. L'Indice de prix (IP) du lait est relativement stable en comparaison à ceux des autres produits agricoles. Au cours de la période de janvier 2012 à juin 2021, il a oscillé entre 96 et 116. De juin 2021 à juin 2022, il a connu une tendance à la hausse. L'IP du porc est celui qui a connu le plus de variations. Il est passé de 133 à un maximum de 217 entre janvier 2012 et juillet 2014 pour redescendre à 100 vers la fin de 2016. Par la suite, il a fortement oscillé entre 100 et un maximum de 222 qui a été atteint en juin 2021. De juin 2021 à juin 2022, il a connu une tendance à la baisse. L'IP des grains est passé de 152 à 184 entre janvier 2012 et septembre 2012 puis a diminué à 110 au début de 2014. Par la suite, il a suivi une tendance à la hausse jusqu’en juin 2022. Pour terminer, l'IP des oléagineux est passé de 146 à 180 entre janvier 2012 et mai 2014 pour diminuer à 129 en novembre 2015. Par la suite, il a suivi une tendance à la hausse jusqu’en juin 2022.
En 2020 et 2021, les frais d’intérêts, de court et long terme, de l’ensemble des exploitations agricoles québécoises ont reculé respectivement de 3,4 % et 2,5 %, notamment par l’action de la BC qui a diminué son taux directeur au niveau plancher de 0,25 %. Afin de faire diminuer les fortes pressions inflationnistes, la BC a entamé la hausse de son taux directeur au mois de mars, de sorte qu’il se situe à 3,25 % en date du 13 octobre 2022. L’inflation devrait atteindre près de 7 % en 2022 au Canada alors que le taux d’inflation ciblé par la BC se situe dans une fourchette de 1 % à 3 %. Ainsi, la Banque pourrait poursuivre la hausse de son taux directeur si nécessaire pour juguler l’inflation. Par conséquent, il faut s’attendre à ce que l’amorce de la hausse des coûts d’emprunt en 2022 ait des effets sur les résultats économiques de cette année et de l’an prochain.
Version texte du graphique Taux d'intérêt administrés des banques à charte, 2010 à 2022
De 2010 à 2017, le taux directeur et les taux d'intérêt ont connu une certaine stabilité marquée de quelques variations, dont une légère baisse de 2015 à 2016. À la moitié de l'année 2017, les taux ont amorcé une hausse suivie d'une stagnation en 2019. Avec le début de la pandémie au mois de mars 2020, les taux ont chuté et ont atteint généralement les mêmes niveaux qu'en 2016. Depuis le mois de mars 2022, le taux directeur et les taux d'intérêt ont connu une hausse marquée.
Depuis sa chute au mois de mars 2020, le prix du pétrole, à l’échelle mondiale, a connu une forte tendance à la hausse en raison d’une offre limitée. Celle-ci s’explique notamment par des difficultés à ajuster la production en raison de pénurie de main-d’œuvre qualifiée et des incitatifs à maintenir un prix élevé sur le marché afin de répondre aux attentes économiques. Ainsi, les prix des carburants atteignent des niveaux records en 2022, provoquant la hausse du coût des intrants agricoles. Le prix moyen du baril de pétrole West Texas Intermediate (WTI) devrait s’avérer environ 40 % plus élevé en 2022 qu’en 2021.
Par ailleurs, la hausse de la valeur de la devise canadienne, à la suite de sa chute engendrée par le début de la pandémie, s’est poursuivie seulement jusqu’au mois de mai 2021. Le dollar a ensuite connu une légère tendance à la baisse de sorte que la valeur moyenne de 2022 devrait se situer en dessous de celle de 2021. Ceci constitue un facteur favorable du point de vue de la compétitivité des produits agricoles et agroalimentaires québécois et canadiens sur les marchés, dont les prix de référence sont fixés en dollars américains. En contrepartie, la dépréciation de la valeur de la devise canadienne en 2022 a pour effet d’augmenter les prix des achats d’intrants et d’équipements agricoles importés. À titre d’exemple, pour les années 2011 et 2012, la parité permettait d’acheter de l’équipement en dollars américains sans être pénalisé par le taux de change. Habituellement, la tendance de la valeur de la devise canadienne suit celle du prix du pétrole, mais en raison des tensions géopolitiques actuelles, le dollar américain s’apprécie étant donné qu’il est considéré comme une valeur refuge.
Version texte du graphique Taux de change et prix du pétrole, 2007 à 2022
Le taux de change et le prix du pétrole ont connu une tendance à la hausse de 2007 jusqu’à la première moitié de 2008 pour chuter brusquement de la deuxième moitié de 2008 jusqu’au début de l’année 2009. Par la suite, la reprise de leur croissance fut aussi annulée par une chute importante amorcée au second semestre de 2014 et qui s'est terminée au début de l'année 2016. De 2016 à 2018, la légère tendance à la hausse fut caractérisée par de nombreuses oscillations tant pour le prix du pétrole que le taux de change. En 2019, les valeurs de ces deux variables économiques ont légèrement diminué et connu de moins fortes oscillations. Avec le début de la pandémie au mois de mars 2020, le prix du pétrole a chuté pour rebondir, puis suivre une tendance à la hausse. Quant au taux de change, il a chuté avec le début de la pandémie au mois de mars 2020 pour suivre, jusqu’au premier semestre 2021, une tendance à la hausse suivie d’une tendance à la baisse.